Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon
Auteurs   DAUDET, Alphonse (Auteur)
Edition  Le livre de poche : Paris , 1982
Fabrication  Impr. Brodard et Taupin : 72-La Flèche
Collection   Le livre de poche N°5672
Collation   156 p
Illustration   couv. ill. en coul
Format   17 cm
indice Dewey   83
ISBN   2-253-03009-0
Prix   10 F
Langue d'édition   français
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Les Molières 9141111395 R DAU MAAdulte / réserveDisponible
Résumé : PREMIER ÉPISODE'>À TARASCON'>1'>LE JARDIN DU BAOBAB1'>Ma2 première visite à Tartarin de Tarascon3 est restée dans ma vie comme une date inoubliable ; il y a douze ou quinze ans de cela, mais je m'en souviens mieux que d'hier. L'intrépide Tartarin habitait alors, à l'entrée de la ville, la troisième maison à main gauche sur le chemin d'Avignon. Jolie petite villa tarasconnaise avec jardin devant, balcon derrière, des murs très blancs, des persiennes vertes, et sur le pas de la porte une nichée de petits Savoyards4 jouant à la marelle ou dormant au bon soleil, la tête sur leurs boîtes à cirage.Du dehors, la maison n'avait l'air de rien.Jamais on ne se serait cru devant la demeure d'un héros. Mais, quand on entrait, coquin de sort ! ...De la cave au grenier, tout le bâtiment avait l'air héroïque, même le jardin ! ...Oh ! le jardin de Tartarin, il n'y en avait pas deux comme celui-là en Europe. Pas un arbre du pays, pas une fleur de France ; rien que des plantes exotiques, des gommiers5, des calebassiers6, des cotonniers, des cocotiers, des manguiers, des bananiers, des palmiers, un baobab, des nopals7, des cactus, des figuiers de Barbarie, à se croire en pleine Afrique centrale, à dix mille lieues8 de Tarascon. Tout cela, bien entendu, n'était pas de grandeur naturelle ; ainsi les cocotiers n'étaient guère plus gros que des betteraves, et le baobab (arbre géant, arbor gigantea) tenait à l'aise dans un pot de réséda9 ; mais c'est égal ! pour Tarascon, c'était déjà bien joli, et les personnes de la ville, admises le dimanche à l'honneur de contempler le baobab de Tartarin, s'en retournaient pleines d'admiration.Pensez quelle émotion je dus éprouver ce jour-là en traversant ce jardin mirifique ! ... Ce fut bien autre chose quand on m'introduisit dans le cabinet10 du héros.Ce cabinet, une des curiosités de la ville, était au fond du jardin, ouvrant de plain-pied sur le baobab par une porte vitrée.Imaginez-vous une grande salle tapissée de fusils et de sabres, depuis en haut jusqu'en bas ; toutes les armes de tous les pays du monde : carabines, rifles11, tromblons12, couteaux corses, couteaux catalans, couteaux revolvers13, couteaux poignards, kriss malais14, flèches caraïbes, flèches de silex coups-de-poing15, casse-tête16, massues hottentotes17, lassos mexicains, est-ce que je sais 'Par là-dessus, un grand soleil féroce qui faisait luire l'acier des glaives et les crosses des armes à feu, comme pour vous donner encore plus la chair de poule... Ce qui rassurait un peu pourtant, c'était le bon air d'ordre et de propreté qui régnait sur toute cette yataganerie18. Tout y était rangé, soigné, brossé, étiqueté comme dans une pharmacie ; de loin en loin, un petit écriteau bonhomme sur lequel on lisait :Flèches empoisonnées, n'y touchez pas !Ou :Armes chargées, méfiez-vous !Sans ces écriteaux, jamais je n'aurais osé entrer.Au milieu du cabinet, il y avait un guéridon. Sur le guéridon, un flacon de rhum, une blague19 turque, les Voyages du capitaine Cook20, les romans de Cooper21, de Gustave Aimard22, des récits de chasse : chasse à l'ours, chasse au faucon, chasse à l'éléphant, etc. Enfin, devant le guéridon, un homme était assis, de quarante à quarante-cinq ans, petit, gros, trapu, rougeaud, en bras de chemise, avec des caleçons de flanelle, une forte barbe courte et des yeux flamboyants ; d'une main il tenait un livre, de l'autre il brandissait une énorme pipe à couvercle de fer, et, tout en lisant je ne sais quel formidable23 récit de chasseurs de chevelures, il faisait, en avançant sa lèvre inférieure, une moue terrible, qui donnait à sa brave figure de petit rentier tarasconnais ce même caractère de férocité bonasse qui régnait dans toute la maison.Cet homme, c'était Tartarin, Tartarin de Tarascon, l'intrépide, le grand, l'incomparable Tartarin de Tarascon.1. Cet arbre, au tronc énorme (jusqu'à 20 m de circonférence), pousse dans les régions tropicales (Afrique, Australie). Sa présence à Tarascon est donc surprenante.2. Daudet pensait faire du narrateur un personnage de la fiction, compagnon des chasses de Tartarin. Finalement, il n'apparaîtra que dans ce premier chapitre.3. Ville de Provence, à 20 km au nord d'Arles, le long du Rhône ; 7 500 habitants à l'époque.4. Avant le rattachement de la Savoie à la France en 1860, les petits Savoyards quittaient leur pays pour exercer de petits métiers (cireurs de chaussures ou ramoneurs). Ils constituent des figures populaires de la chanson et de la littérature du xixe siècle.5. Arbres qui produisent des gommes, comme l'eucalyptus, l'acacia, etc.6. Arbres tropicaux produisant des courges.7. Plantes grasses répandues dans les régions chaudes de l'Amérique, tout comme les figuiers de Barbarie.8. Une lieue, ancienne mesure linéaire, équivaut à environ 4 km. Mais le tour de la Terre comptant, selon Littré, 10 000 lieues, on est finalement revenu à Tarascon !9. Plante herbacée de taille moyenne.10. Salle contenant des objets d'art, des curiosités. Voir Préface, pp. 12-13.11. Carabines à canon long.12. Fusils courts, à canon évasé.13. Pistolets ou revolvers dont le canon était prolongé d'une lame, utilisés pour achever le gros gibier en combat rapproché.14. Poignards à lame ondulée.15. Petits pistolets de poche dont la longueur ne dépasse pas 10, 8 cm.16. Massues.17. Hottentots : peuple pasteur et nomade du Sud-Ouest africain.18. Néologisme forgé sur yatagan , sabre incurvé en deux sens opposés, qui était en usage chez les Turcs et les Arabes.19. Petite poche en cuir pour le tabac.20. Le capitaine anglais James Cook (1728-1779), explorateur de la Polynésie et de la Nouvelle-Calédonie, découvrit la Nouvelle-Zélande et les îles Sandwich. Il est l'auteur d'un Voyage autour du monde (1777) dont deux traductions françaises parurent en 1811 et 1817.21. L'écrivain américain James Fenimore Cooper (1789-1851) est l'auteur, entre autres, du Dernier des Mohicans (1826) et de La Prairie (1828). Ces romans, qui ont pour toile de fond les affrontements entre Indiens et pionniers pendant la conquête de l'Ouest en Amérique du Nord, furent rapidement traduits en France et obtinrent un immédiat succès populaire.22. Gustave Aimard, pseudonyme d'Olivier Gloux (1818-1883), est un contemporain de Daudet qui vécut plusieurs années avec les Peaux-Rouges d'Amérique du Nord. Il publia des romans d'aventure qui connurent un grand succès : Les Trappeurs de l'Arkansas (1858), Les Pirates des prairies (1859)...23. Au sens étymologique : terrible, effroyable.2'>COUP D''IL GÉNÉRAL JETÉ SUR LA BONNE VILLE DE TARASCON LES CHASSEURS DE CASQUETTES'>Au temps dont je vous parle, Tartarin de Tarascon n'était pas encore le Tartarin qu'il est aujourd'hui, le grand Tartarin de Tarascon si populaire dans tout le Midi de la France. Pourtant ' même à cette époque ' c'était déjà le roi de Tarascon1.Disons d'où lui venait cette royauté.Vous saurez d'abord que là-bas tout le monde est chasseur, depuis le plus grand jusqu'au plus petit. La chasse est la passion des Tarasconnais, et cela depuis les temps mythologiques où la Tarasque2 faisait les cent coups dans les marais de la ville et où les Tarasconnais d'alors organisaient des battues contre elle. Il y a beau jour, comme vous voyez.Donc, tous les dimanches matin, Tarascon prend les armes et sort de ses murs, le sac au dos, le fusil sur l'épaule, avec un tremblement de chiens, de furets3, de trompes, de cors de chasse. C'est superbe à voir... Par malheur, le gibier manque, il manque absolument.Si bêtes que soient les bêtes, vous pensez bien4 qu'à la longue elles ont fini par se méfier.A cinq lieues autour de Tarascon, les terriers sont vides, les nids abandonnés. Pas un merle, pas une caille, pas le moindre lapereau, pas le plus petit cul-blanc5.Elles sont cependant bien tentantes ces jolies collinettes tarasconnaises, toutes parfumées de myrte, de lavande, de romarin6 ; et ces beaux raisins muscats gonflés de sucre, qui s'échelonnent au bord du Rhône, sont diablement appétissants aussi... Oui, mais il y a Tarascon derrière, et, dans le petit monde du poil et de la plume, Tarascon est très mal noté. Les oiseaux de passage eux-mêmes l'ont marqué d'une grande croix sur leurs feuilles de route, et q...
Notes : Titre de couv. : "Tartarin de Tarascon"